top of page

Santé mentale : Comment allons-nous ?

Article issu de la revue N°13 Pour un Monde Plus Humain "Santé mentale : Comment allons à nous ?" de UP for Humaness. Voici le lien pour la commander Abonnement - Pour un monde plus humain - UP for Humanness


Comment allons-nous ? Cette question nous interpelle à plus d’un titre. Ça va  ? Comment ça va  ? Comment vas-tu  ? Tu vas bien  ? Autant de formules pour éviter un bonjour trop sec et pourtant sans toujours réelle intention d’écouter la réponse. Comment allons-nous ? nous interroge aussi ici sur l’état psychique de la communauté humaine que nous formons quand l’état psychique relève de l’intime de chaque personne et quand l’autonomie est érigée en valeur suprême de la société. Enfin, cette question si anodine en apparence est révélatrice du mouvement qu’est notre vie et qui anime notre psyché. En effet, nous utilisons le verbe «  aller  ».


Comment allons-nous  ? C’est finalement s’interroger sur la manière dont nous traversons physiquement, psychiquement, émotionnellement, socialement, spirituellement notre existence, ses épreuves et ses joies, sur les mouvements que nous parvenons à accomplir pour avancer, pour devenir.


Alors… Comment allons-nous ?


Visiblement pas très bien et de moins en moins bien ! La santé mentale est le premier poste des dépenses de l’Assurance maladie. Chaque année, 1 Français sur 5 est touché par un trouble psychique, soit 13 millions de personnes. Par ailleurs, l’OMS affirme qu’1 personne sur 4 sera touchée par un trouble psychique au cours de sa vie. Le lecteur qui se sent bien, satisfait de son existence, ou pas trop insatisfait, se dit ici : « ça ne risque pas de m’arriver, cela concerne les gens fragiles, qui sont malades  ». Pardon cher lecteur d’assombrir votre lecture, malheureusement, il n’en est rien ou plus précisément les choses sont beaucoup complexes. Bien sûr, certaines personnes souffrent de troubles psychiques en raison de fragilités émotionnelles, physiologiques ou même génétiques. D’autres ont déclenché un trouble psychique en raison d’une addiction ou d’un traumatisme. Mais nombreux sont ceux qui souffrent aujourd’hui dans leur corps et leur esprit par difficultés qui semblent trop durer, par épuisement dans un travail ou dans un monde trop incertain et instable et par sentiment d’impuissance et d’isolement. A l’heure où notre système de santé craque avec une offre en psychiatrie insuffisante et essentiellement médicale oubliant souvent les autres dimensions de la personne, à l’heure d’errances diagnostiques de plusieurs années, la dégradation de la santé mentale ne peut que s’accélérer. En effet, les personnes atteintes de troubles n’ont pas d’accompagnement adapté pendant de longues années amplifiant leur isolement, précarisation, etc. En outre, nous mettons en danger les proches des personnes malades qui n’ont d’autres choix que d’assumer des situations extrêmement douloureuses, souvent dangereuses pour la personne malade et/ou pour eux-mêmes, aggravées par la culpabilité et la honte que les préjugés encore à l’œuvre leur infligent.


Isolement, peur, stigmatisation, ignorance, indifférence, souffrance, désespoir, calvaire. Ce sont les mots communément employés par les personnes souffrantes de troubles psychiques pendant le déni, l’errance diagnostique et les phases de rechutes en raison d’un traitement ou accompagnement non adaptés. Ce sont aussi les mots de leurs familles.


Que Dieu m’épargne la folie. Mieux vaut le bourdon, le bissac ; le dur travail, la faim. Ce n’est pas que je tienne tant à ma raison : si je dois la quitter bon voyage et bon vent! Si seulement on me laissait libre, je courrais, léger, dans la sombre forêt, je chanterais, ardent et délirant, je me perdrais dans les fumées de beaux rêves confus.

Je m’oublierais au chant des vagues, ivre de joie, je perdrais mon regard dans le vide des cieux ; je serais fort, je serais libre, tel l’ouragan qui ravage les champs, qui abat les forêts.

Oui mais voilà : devenir fou, c’est faire peur comme la peste, c’est se faire encager et se voir enchaîné, pauvre bête, c’est endurer, à travers une grille, des railleries cruelles, c’est entendre la nuit non la voix éclatante du rossignol, le bruit sourd des grands bois, mais les cris de ses compagnons, les jurons des gardiens de nuit, le crissement des chaînes.


Alexandre Pouchkine, Poésies, 1833 Pouchkine exprime avec force ce qu’offre parfois à l’être de quitter la raison  – rêveries infinies, liberté auxquelles chacun d’entre nous aspire souvent –, mais aussi l’interdit de cette perte de raison que le regard des autres porté sur elle inflige. Peur et moqueries isolent le fou, l’excluent de la société et finissent par transformer l’être en bête à force d’enfermements, cages et chaînes.


Nous étions en 1833… Où en sommes-nous 200 ans plus tard? Fort heureusement, certaines pratiques ont évolué voire disparu depuis le 19e siècle… Ce n’est que dans les dernières décennies que différentes prises de conscience et de nouvelles manières d’envisager la santé mentale pour tous et le rétablissement pour les personnes atteintes de troubles psychiques nous donnent des raisons d’espérer. C’est fragile au regard des évolutions de la société et de l’état de nos services publics. Nous devons poursuivre et structurer nos efforts sans désemparer.


Quels ingrédients semblent requis ? Comment nous y prendre ?


Se laisser guider et transformer par la vulnérabilité pour aller mieux


Éloge de la vulnérabilité et de l’hospitalité


Nous sommes tous vulnérables et c’est une bonne nouvelle!


Il nous semble urgent de considérer la vulnérabilité comme une condition de notre humanité et de notre capacité à faire société, à construire une société qui permette « la permanence d’une vie authentiquement humaine  » (H. Jonas). La vulnérabilité n’est pas la fragilité, c’est notre capacité à nous laisser toucher par ce qui nous entoure, notre environnement, les autres et donc à réagir et agir pour notre survie, évolution, etc. Être vulnérable, c’est la possibilité d’être blessé par un extérieur agressant, inadapté mais aussi la possibilité d’être ému, transformé. Cela nous oblige alors visà-vis des personnes les plus fragilisées afin qu’elles puissent non plus être blessées par surcroît mais reconnues et soutenues par surcroît. Leur fragilité et vulnérabilité accrue révèlent les nôtres. Leur fragilité et vulnérabilité accrue révèlent aussi les failles de notre société, une société qui, faisant de l’autonomie la valeur suprême, est blessante puisqu’inadaptée à ceux de ses membres qui n’ont pas les codes, qui ont des troubles cognitifs, un trouble psychique, un traumatisme, un épuisement.


« La vieillesse porte en elle l’histoire de notre humanité » nous dit R. Caron. Par ses bouleversements sur les deux aspects : santé – avec la vulnérabilité plus importante du corps – et socialité – avec un effritement du lien social de plus en plus prégnant –, la vieillesse nous fait éprouver notre finitude. Or nous observons que notre société la rejette avec une tyrannie du bien-vieillir, une mise à distance des personnes âgées dans des lieux où elles doivent trop souvent toutes vivre aux mêmes rythmes… C’est pourtant la relation à l’autre qui fait vivre chacun de nous, la vie psychique ne vieillissant pas et son état dépendant grandement de notre capacité à être relié. R. Caron citait Paul Valéry : « La vieillesse n’est rien. Tout dépend de l’hospitalité que vous lui donnez et de l’écho qu’elle trouve en vous.  »


Nous aimerions élargir cette invitation  : «  La vulnérabilité n’est rien. Tout dépend de l’hospitalité que vous lui donnez et de l’écho qu’elle trouve en vous. » Pour ne pas condamner les personnes en détresse psychique à trouver « refuge dans un monde qui [leur] appartient en exclusivité » (L. Vignault) et qui les isole, travaillons à ce que la société, les établissements et personnes qui les accompagnent, les entreprises, nos structures administratives, nos regards soient hospitaliers envers chaque cri de détresse et chaque situation et considèrent la vulnérabilité intrinsèque à chacun et à chaque entreprise humaine comme une source de questionnement et de transformation.


D’immenses progrès en découleront. Et certainement au profit d’une performance collective et durable dans bien des domaines.


Santé mentale : grande cause nationale 2025


Pour sensibiliser largement, susciter dialogue, prises de conscience, prévention et envisager de meilleurs accompagnements, une impulsion politique forte est requise. Santé physique et psychique sont indissociables, l’une préservant ou altérant l’autre, temporairement ou durablement.

Nous observons une croissance des troubles psychiques dans notre pays. Les différentes crises sanitaire, économique, environnementale, politique et géopolitique ont des répercussions dramatiques et ce, dès le plus jeune âge. Il convient de rappeler la dimension positive de la santé mentale.

Selon l’OMS, « la santé mentale est un état de bien-être dans lequel la personne peut se réaliser, surmonter les tensions normales de la vie, accomplir un travail productif et contribuer à la vie de sa communauté. »

Elle est donc à préserver, entretenir puisque vulnérable (perméable) à l’environnement dans lequel la personne vit, à son sentiment de sécurité, à l’état de ses relations aux autres, à son état de santé, etc. En cela, nous sommes bien tous concernés. Faire de la santé mentale une grande cause nationale, c’est aussi déstigmatiser. Déstigmatiser les troubles psychiques, encore trop souvent sources de honte, tabous ; déstigmatiser le recours à un psychologue ou un psychiatre. Non, toutes les personnes schizophrènes ne sont pas des tueurs en série comme le sous entendent de trop nombreux articles de presse. Non, recourir à un psychologue ou un psychiatre ne veut pas dire que l’on est fou ou en passe de le devenir. C’est prendre soin de sa santé mentale dont on a vu qu’elle est une composante essentielle à notre bien-être, à notre capacité d’existence. Sensibiliser et former le grand public, le monde de l’éducation, le monde universitaire, le monde du travail, les médias sont urgents.


Prévenir et libérer la parole


Éduquer et sensibiliser à la santé mentale et aux signes avant-coureurs des troubles psychiques de l’école à l’entreprise


Ces sensibilisations et formations que nous appelons de nos vœux doivent éduquer aux facteurs de risque pour notre santé mentale à tous. Des programmes adaptés aux enseignants, parents, enfants, adolescents, salariés, etc. ainsi que des outils de mesure doivent être développés et promus pour avoir la capacité d’évaluer son risque mais aussi l’environnement dans lequel on évolue. L’organisation, la culture éducative ou managériale, la qualité des relations comportent-elles des facteurs de risque pour la santé mentale des différentes communautés en présence ?


Des référents en santé mentale dans chaque organisation pourraient assurer un questionnement et la mise en place d’outils pour prévenir ou accompagner des situations à risque. Nous préconisons aussi de promouvoir la formation aux Premiers Secours en Santé Mentale dans les parcours des enseignants, des responsables des ressources humaines et des managers.


Proposer des consultations en santé mentale précoces et régulières


Pour assumer le caractère essentiel de notre santé mentale, 3 à 5 consultations dédiées pourraient être proposées et prises en charge par l’assurance maladie en complément des consultations de suivi médical en vigueur. Soit le médecin aura développé une capacité en santé mentale via un diplôme ou une certification, soit la consultation en santé mentale sera réalisée par un psychologue agréé. Deux tiers des personnes avec un trouble n’osent pas aller chercher de l’aide nous dit Luc Vignault et l’errance diagnostique en psychiatrie peut se compter en dizaines d’années. Cette proposition serait à la fois une mesure de prévention afin de transmettre les bonnes pratiques pour préserver sa santé mentale, une mesure propice à diminuer l’errance diagnostique en cas de symptômes, mais aussi une mesure de déstigmatisation par l’inscription dans la vie de tous de l’attention à donner à la santé mentale.


Développer des espaces d’écoute et de dialogue


Il revient dans bon nombre de témoignages de personnes atteintes de troubles psychiatriques ou de personnes ayant vécu un burn-out l’impossibilité de  faire entendre leur détresse, leurs difficultés, leur voix. Les causes qui ont conduit à la crise, à l’arrêt du traitement ne sont que trop rarement analysées. « A quoi bon, c’est parce que la personne est fragile, qu’elle a un problème puisque, nous, cela ne nous arrive pas » ! La culpabilité et/ou le sentiment d’impuissance et de mésestime de soi reviennent à la personne en souffrance. Or l’isolement est un des facteurs de risque principaux d’une décompensation. Des espaces de dialogue et d’écoute des difficultés vécues sont à créer et systématiser pour prévenir les risques comme pour analyser les conditions de la crise pour déceler ce qui peut être amélioré pour la personne mais aussi pour l’organisation considérée. Cela devrait être obligatoire dans les métiers à forte exigence et pression.


Certains «  patients  » ont décidé de se former pour devenir «  patients experts  » ou «  pair-aidants  ». De leur expérience vécue, ils espèrent aider les personnes en souffrance et les organisations pour prévenir, accompagner, éviter les rechutes. Le système de santé comme les entreprises gagneront à engager ces patients experts dans les formations des soignants ou des managers ou dans l’animation de ces espaces d’écoute et de dialogue à développer.


Renouveler la vision du soin et s’ouvrir à la coopération


Former les soignants à la santé mentale et au rétablissement « Les plus grands stigmatiseurs sont les soignants ! », voilà le cri de Luc Vignault dans son article. Nos soignants sont trop peu formés à la dimension psychologique et humaine de leur action de soin, trop peu formés au prendre soin.

Or de très bons techniciens ne suffisent pas en santé. Ils soignent des personnes qui au-delà de leur pathologie ont une histoire, une pensée, une vie familiale, psychique, spirituelle, professionnelle, sociale, etc.

Déjà en difficulté pour accompagner l’ensemble de ses dimensions chez une personne ayant « juste » une maladie somatique, imaginons leur difficulté face aux personnes atteintes d’un trouble psychique (la même observation est réalisée pour les personnes précaires et les personnes en situation de handicap…).

La surmortalité de celles-ci et leur espérance de vie diminuée de 15-20 ans en disent long. Les patients experts, les responsables associatifs, des aidants sont des personnes qui peuvent ajouter de la connaissance au savoir, c’est-à-dire témoigner de l’expérience vécue au-delà des signes physiologiques et cliniques.

En outre, les soignants ont besoin d’être formés aux différentes approches thérapeutiques dans la philosophie du rétablissement, de s’attacher à la situation singulière du patient, d’explorer scrupuleusement les interventions non médicamenteuses qui font l’objet d’un nouveau cadre pour s’assurer de leur efficience (cf. NPIS).


En développant des formations initiales et continues en santé mentale pour tous les soignants avec des immersions dans des associations, des lieux d’accueil de personnes souffrant de troubles psychiques, chaque personne atteinte pourra apprivoiser plus facilement sa maladie, rester acteur de sa vie, découvrir aussi ce que l’épreuve de la maladie a déployé comme capacités en elle et comment elle peut contribuer à la société, accéder à ses droits et exercer sa citoyenneté. La vie de leur famille en sera aussi facilitée.


Considérer l’expérience et la connaissance des proches


Quand le trouble psychique fait effraction dans la vie d’une personne, il fait effraction dans celle de sa famille avec presque autant de violence. Sentiment d’impuissance, angoisse que l’aimé se détruise parfois jusqu’à attenter à sa vie, culpabilité, honte, détresse et sentiment d’abandon. Le déni s’invite souvent dans les premiers temps de la maladie. Puis il faut se rendre à l’évidence, il y a bien un problème, mais lequel ?

Le diagnostic met parfois des dizaines d’années à être posé, ce qui sous-entend des années de mauvais traitements, de tâtonnements chimiques délétères pour la vie psychique, la vie sociale et la santé de la personne malade d’abord mais aussi pour celles de ses proches quand ils n’ont pas fui de rejet, de peur ou d’épuisement. Une sensibilisation grand public, des mesures dès l’école diminueront certainement ces phases de déni et d’errance, mais quand la maladie survient, les proches ont besoin d’être guidés.

Centraliser les informations pour s’orienter plus facilement dans le système de santé, découvrir la diversité des approches thérapeutiques de manière fiable, développer des espaces d’écoute des familles sont autant d’initiatives à démultiplier. La prise en considération de la parole du proche doit faire partie de la phase de diagnostic. Ce qu’il observe, entend, vit viendra compléter ce que la personne malade exprime. Leur rôle est également crucial pour prévenir ou accompagner une rechute.

Oui, nous le savons, tout cela nécessite du temps et la pénurie de psychiatres et de structures ne semble pas le permettre. Pourtant, notre conviction est que la connaissance des proches de la situation est un gain de temps clinique majeur. Une alliance thérapeutique pluridisciplinaire avec la personne malade et le ou les proches est indispensable et encore trop rarement organisée.


Développer des initiatives de coopération pluridisciplinaire sur chaque territoire


Face aux contraintes budgétaires, aux déserts médicaux et au nombre croissant de personnes et familles en détresse, nous devons, au-delà d’envisager de nouvelles structures, démultiplier les coopérations d’acteurs à l’échelle des territoires, des systèmes de relais entre acteurs. Le trouble psychique ne peut plus être uniquement l’objet de médications ou d’hospitalisations successives.

Psychiatres, psychologues, praticiens d’interventions non médicamenteuses référencées, pair-aidants, proches, associations, acteurs sociaux doivent s’engager avec le patient dans un plan de rétablissement personnalisé à évaluer et ajuster régulièrement.

Au-delà de rencontres pluridisciplinaires à rémunérer, des outils de transmission des informations, des systèmes d’alerte, des outils d’évaluation de la situation par le patient et ses proches sont à développer. Nous diminuerons ainsi sans doute la prévalence d’accidents dramatiques et peut-être même de certaines hospitalisations. L’accompagnement personnalisé et global des personnes malades est source d’économies pour notre système de santé. Nous savons à quel point le système de santé souffre.

Nous voulons rendre hommage à tous les soignants qui résistent et innovent dans des conditions de plus en plus précaires et en particulier en psychiatrie.


La complexité est telle que nous sommes parfois tentés par l’immobilisme, la résignation. Pourtant les ingrédients de déstigmatisation, sensibilisation, formation, prévention, coopération et innovation peuvent donner un cadre propice à une mobilisation collective et une amélioration de la situation. Mais pour y parvenir, il convient de se donner une vision et des objectifs. En cela, nous souhaitons saluer et soutenir l’engagement exceptionnel du monde associatif pour faire de la santé mentale la cause nationale 2025.


Cette réflexion sur la santé mentale et la prise de conscience qu’elle permet sur notre rapport à la vulnérabilité nous invite à repenser l’autonomie, dont on a dit qu’elle est aujourd’hui érigée en valeur suprême de notre société et quête légitime de chacun, dans une dimension relationnelle. En effet, la reconnaissance de notre vulnérabilité intrinsèque nous engage dans une interdépendance. Nous sommes des êtres de relation et ne pouvons alors nous soustraire à l’appel de l’autre, à notre responsabilité vis-à-vis de cet autre, sans risquer une lente, insidieuse mais certaine déshumanisation.

«  Il s’agit de dire l’identité même du moi humain à partir de la responsabilité, c’est-àdire à partir de cette position ou de cette déposition du moi souverain dans la conscience de soi, déposition qu’est précisément sa responsabilité pour autrui.


 La responsabilité est ce qui exclusivement m’incombe et que, humainement, je ne peux refuser. Cette charge est une suprême dignité de l’unique.  »


En acceptant de nous faire bousculer par ces autres qui dérangent nos certitudes et nos conforts, nous sommes invités à mieux comprendre ce qui nous rend humain, à revisiter notre rapport à nous-mêmes, à l’autre, à notre fragilité, à notre vulnérabilité, à notre liberté et à ainsi vivre en plénitude.

Viser l’autonomie relationnelle, c’est construire une société et un système de santé qui préservent le pouvoir d’agir de chacun et sa liberté de choix par la qualité de la relation, par l’attention patiente et fervente donnée à l’autre pour qu’il puisse se raconter, se reposer, se rétablir, s’épanouir car, « nous ne cherchons tous qu’une seule chose dans cette vie  : être comblés par elle – recevoir le baiser d’une lumière sur notre cœur gris, connaître la douceur d’un amour sans déclin.

Être vivant c’est être vu, entré dans la lumière d’un regard aimant : personne n’échappe à cette loi, …».


Alors…, comme nous y invite Bobin, « […] il nous faudrait éclairer chaque présence d’un amour à chaque fois unique, adressé en elle à sa solitude inconsolable et pure. Il nous faudrait apprendre à compter un par un chaque visage, chaque vague et chaque ciel, en donnant à chacun la lumière qui lui revient dans cette vie obscure . »


Diane d'Audiffret, Directrice Générale de SIS UP et UP for Humanness





bottom of page